Les vrais raisons du départ

Je sais, ça a l'air dingue que je puisse quitter un poste aussi intéressant après que toute ma hierarchie m'ait supplié de rester, mais j'ai quand même mes raisons. Faut savoir que je suis très oldschool vis-a-vis du boulot. J'aime bien bosser avec des gens carrés.

Je peux être payée à faire du tricot sur un radeau à la dérive sur l'Amazone pour 5€ de l'heure, tant que ça me plaît, que j'apprends des choses et qu'on ne se fout pas de ma gueule. Je ne broncherai pas.

Là, même si j'ai beaucoup appris et que le boulot me plaît, ils se sont bien foutu de ma gueule.

Autant le dire, en fixe j'étais à 24K€. J'ai pu comprendre ce salaire de mârde et l'accepter parce que SuperSSII était payée au succès (un candidat signe = SuperSSII touche de l'argent, aucun candidat ne signe = SuperSSII travaille à perte), et que les locaux et l'ambance GrosseBoîte étaient pas mal.
Chez GrosseBoîte nous avions une super cantine, une salle de sport, une coure intérieure avec des arbres pour prendre des pauses, pas de contraintes horaires, une autonomie de malade, des PCs portables...
J'avais un poste intéressant dans des locaux classe avec des collègues sympas à 38 mins de chez moi.

Certes, il n'y avait pas d'activité, et c'est vrai que c'est frustrant de rencontrer un bon candidat et de se dire que si on était dans une SSII normale, on pourrait l'embaucher mais que là....non. Que de travail pour rien...

De tous temps SuperSSII a menacé de nous ramener pour bosser au siège si GrosseBoîte ne nous donnait pas plus d'activité. Oui, logique, on ne va pas payer 2 chargées de recrutement à ne rien faire surtout si elles ne sont pas rentables.
On va les mettre sur nos demandes, nos profils, nos clients, d'autant que du travail il ne faut pas s'inquiéter, il y en a chez SuperSSII. "Dailleurs on manque de bras" nous serinent nos chefs "les filles, il ne faut pas vous inquiéter".

Donc moi, pour tout avouer quand on m'a dit que j'allais bosser chez SuperSSII je me suis dit "youpi, je vais retrouver un rythme de travail normal et arrêter de perdre mes bonnes habitudes de boulot".

Je me retrouve dans une petite BU (normal sur un effectif de 8 personnes pour la partie SSII) composée d'un commercial, d'un responsable d'agence et de moi-même.
Je commence un mardi, premier jour de mon responsable d'agence aussi. Il passe donc la premiere semaine à prendre connaissance de son environnement de travail, de la base de données, il va à 2-3 déjeuners clients, il parle avec l'autre commercial et il prend le temps de me dire qu'il veut tels candidats.

Ca tombe bien, ça fait 3 jours que je lui demande sur quoi je bosse. Il me fait un mini truc sur powerpoint où il me dit qu'il cherche des développeurs java et .Net. Ah comme 98% des SSII en ce moment. C'est cool. Et donc, quand ces candidats hypers sollicités (80 appels/jour, on a testé) je réussis à les avoir au téléphone, je leur dit quoi? Venez bosser pour nous, nous sommes beaux, notre logo est sympa?

Il m'a dit qu'il m'aimait bien parce que je posais des qstions pertinentes. Cool, je trouve aussi. Je lui ai demandé de penser à un discours commercial. Je l'attends toujours. Idem pour la démarche vis-à-vis des écoles et la liste des contacts qu'il a pu établir là-bas. Bref.

Je me retrouve dans une BU sans clients. Même si j'ai 2 commerciaux jeunes, motivés et sympas, j'en ai marre des clients inexistants et des signatures qui ne viendront pas. Pis elle est où toute cette activité débordante pour laquelle ils avaient tant besoin de bras?

Je passe sur mon ancienne chef commerciale qui a voulu engager un candidat en CDI parce que ça revenait moins cher pour le virer au bout de 2 mois (bin ouais, hé, la mission durait 2 mois). Cool. J'adore me dire que je bosse pour ce genre de boîtes, ça me fait du bien quand je me lève le matin et que j'ai pas envie d'aller au taff.

Passons aussi sur le gentil DG qui a regardé MaCollègue droit dans les yeux et qui lui a dit texto "mais ici tout le monde est à 26K€ en tant que chargé de recrutement". Le midi nous mangions avec un collègue chargé de recrutement qui avait débuté 2 semaines auparavant et qui était à 28K€. Oui, oui, il a notre âge et le même niveau de diplôme que nous.
Ai vérifié, personne n'avait taggué "grosse buse" sur notre front au marqueur indélébile.

Repensons aux 5 mois d'attente d'augmentation sans réaction de leur part, même quand ils ont vu nos CVs sur la toile. Seule réaction : ma chef commerciale nous prend chacune à notre tour.entre 4 yeux Elle me demande "mais que va penser gentil DG de tout ça?", je lui réponds sans me démonter que j'espère que ça l'incitera à se poser les bonnes questions. Depuis, no news.

Ah et les changements abrupts du jour au lendemain. Un coup on bosse là, le lendemain là, un coup on nous dit que la mission GrosseBoîte va durer 3 ans, 15 jours plus tard nous sommes rapatriées dans les locaux de SuperSSII pour travailler sur des clients inexistants, pendant que sonne la mort du compte GrosseBoîte.

Je ne parle meme pas de l'ambiance délétère. Les pauses dej de la première semaine que j'ai passé chez SuperSSII ont consisté en la dégustation d'un sandiwch devant mon écran toute seule. Ni ma chef ni mes autres collègues ne m'ont proposé ne serait-ce que d'aller chercher le foutu sandwich avec moi. Rien.

Pendant la semaine qu'elle a passé toute seule là-bas MaCollègue a découvert que 5 personnes de la boîte avaient leurs CVs sur le net et cherchaient du boulot plus ou moins activement. 1/3 de l'effectif total de la structure.

Je demande une augmentation et on accepte d'en parler avec moi, non pas parce que je la mérite ou que je fais du bon boulot (je sais, je suis assez naïve), mais parce qu'on a peur que je me casse. Et on compte me proposer 26K€ alors qu'à même pas 3 mètre de moi j'ai un collègue qui en touche 28. Je ne parle meme pas des primes à 40€ et des chèques-cadeau Fnac en cas de dépassement d'objectif de groupe. Mais qu'est-ce qu'il avait bu le mec qui a rédigé ce contrat? Et moi, qui l'ai signé?

On me dit qu'on compte m'envoyer en séminaire de formation à Londres en juin (il est normalement réservé aux nouveaux entrants mais ils nous ont complètement oubliées) alors qu'il n'y aura pas de "fournée de formation" en juin. La dernière est en avril; d'ailleurs ma RRH y va.

Ne parlons pas des séminaires de St Jean Cap Ferrat et Lisbonne auxquels tout le bureau est allé sauf nous, et personne n'a jamais été fichu de nous expliquer pourquoi. Par contre nous avons encore droit aux private jokes et aux photos... ils sont éclatés comme des bêtes.

Pfff...

Ca fait un peu beaucoup quand même. Je sais bien que la boîte idéale honnête, carrée, épanouissante n'existe pas, mais là franchement, SuperSSII je n'y crois plus.